Julien I Chapters 17-18
Chapitre 17
Échec
Contrairement à tous les usages, Julien, qui n'était rien dans cette assemblée de nobles et de dignitaires, fut placé directement à gauche du Premier Sire. Juste à côté de Julien, se tenait Aïn, le Passeur, et il lui fallait faire appel à toute sa volonté pour ne pas le gratter derrière les oreilles comme il l'aurait fait avec Ugo, son chien. Mais il faut dire que sa mère n'aurait jamais toléré qu'un chien s'asseye à table ! Ambar, à l'autre extrémité de la table, paraissait fort mal à l'aise et se collait autant que possible à Niil qui lui montrait discrètement la façon de manger les choses exquises qu'on ne cessait de placer devant eux.
Le Premier Sire laissa à Julien tout le temps de se restaurer avant d'aborder le sujet qui lui tenait à cœur.
“Mon garçon, je sais que tu es impatient de regagner ton monde et ta famille,et nous allons faire tout notre possible pour t'aider. Mais je crains qu'il ne soit nécessaire pour cela de faire examiner de nouveau ton esprit. Je sais par Aïn que cela t'a déjà été très désagréable, mais nous n'avons pas trouvé d'autre moyen pour l'instant. Bien sûr, nous ne ferons rien contre ta volonté. C'est pourquoi je te demande si tu es d'accord.”
Julien n'était pas du tout d'accord ! Il se tourna vers Aïn. Il n'avait plus la moindre envie de lui gratter la tête. Mais il ne pouvait rien lire dans ces grands yeux jaunes. Il se dit qu'après tout il n'était pas si pressé de rentrer. Il se sentait bien ici. Il avait même des amis. C'était comme des vacances, en mieux. Mais naturellement, il ne pouvait pas désirer une telle chose alors que ses parents étaient sans doute morts d'inquiétude... À contrecœur, il acquiesça :
“Oui. Je veux dire, oui, Premier Sire, je suis d'accord pour qu'Aïn rentre encore dans mon esprit.”
“Bien, Maître Aïn viendra te chercher dans la soirée.”
oo0oo
Lorsque la porte s'ouvrit sur l'étrange ''chien bleu'', Julien était prêt depuis longtemps. Il avait revêtu pour l'occasion l'abba verte donnée par Izkya. Niil et Ambar, tous deux vêtus du lakh gris de la Maison des Ksantiris, comptaient bien l'accompagner, mais le Gardien qui se tenait auprès d'Aïn précisa que le premier Sire ne souhaitait pas leur présence. Niil faillit protester, mais il se souvint à temps que les souhaits du Premier Sire étaient des ordres auxquels personne ne s'avisait de désobéir.
Aïn et Julien retrouvèrent le Premier Sire dans une pièce nue, ronde et sans fenêtres où siégeaient aussi trois vieillards à l'air austère, vêtus de robes grises ainsi que deux autres Passeurs dont l'un arborait une fourrure d'un étonnant vert pomme et l'autre, un pelage brun-rouge beaucoup plus classique. Au centre de la pièce, un siège vide, fixé sur un socle légèrement surélevé, semblait destiné à accueillir le candidat à un examen.
“Julien, annonça Sire Aldegard, je voudrais que tu permettes à trois Maîtres des Arts Majeurs de t'examiner. Si tu le veux bien, Aïn et deux autres Maîtres Passeurs les assisteront afin de voir s'il est possible de savoir où et comment tu as rencontré Yol l'Intrépide. Je dois t'avertir que cette opération risque d'être assez désagréable. Personne n'aime voir son esprit envahi, et tu es libre de refuser. Mais nous n'avons, pour l'instant, pas pu imaginer d'autre moyen de trouver comment te renvoyer chez toi. Que décides-tu ?”
La perspective de voir six personnes fouiller dans son crâne le terrifiait. Mais il se rendait compte qu'à moins de recevoir leur aide, il n'avait aucune chance de retrouver ses parents et son monde.
“Noble Sire, je pense que je n'ai pas vraiment le choix.”
“Non, effectivement. Maintenant, le Noble Maître Frenndhir va te demander, au nom de tous, la permission d'entrer dans ton esprit. Je suis ici pour garantir que tout se passe bien et que les règles sont respectées.”
Sur quoi, il fit signe à Julien de prendre place sur le siège. Celui-ci eut soudain la désagréable impression d'